compagnons de voyages
Impossible de sortir sans un bouquin dans mon sac.
Impossible surtout d'envisager la Ligne 13 sans cela !
Alors chaque matin, j'entre dans ma bulle de papier, joignant l'utile au désagréable.
Voici mes dernières lectures, pas forcément des nouveautés, mais quelle importance.
Dites-moi si vous connnaissez, si vous avez aimé, si vous avez lâché avant la fin...
N° 1
Stoner
de John Williams
Nous sommes aux Etats-Unis, dans le Missouri, juste avant la Grande Guerre. William Stoner est un jeune fermier "monté" à la ville pour y poursuivre ses études et y enseigner. Il n'est ni beau ni brillant en société, et semble vivre en marge d'une vie tout juste choisie, auprès d'une épouse en proie au bovarysme, traversant le nez dans les livres les orages qui secouèrent ce tout jeune siècle, frôlant sans pouvoir s'y attarder ce qui aurait pu être une folle histoire d'amour, assistant impuissant au kidnapping affectif de sa propre fille. Le portrait touchant d'un homme ordinaire, sur fond de campus tout en rousseur automnale, vous savez comme dans ces films nostalgiques dont seuls les Américains ont le secret... Et aussi une très belle écriture, "librement" mais talentueusement interprétée par Anna Gavalda.
N° 2
En vieillissant les hommes pleurent
de Jean-Luc Seigle
Encore un milieu rural, mais nous sommes en France cette fois, en 1961, au loin gronde la guerre d'Algérie. Notre héros, Albert Chassaing, est un homme mûr, ouvrier spécialisé chez Michelin. Son fils aîné, Henri, se bat là-bas, par-delà la Méditerranée; son cadet, Gilles, lit Eugénie Grandet; la belle Suzanne, son épouse, coud ses robes sur des modèles de magazines, permanente ses cheveux, et se baigne nue dans la Gorne avec le préposé ; sa mère ne se souvient de rien, sauf de ce qui ne s'oublie pas. Albert, ce matin-là, a décidé de renoncer à vivre. Mais il a auparavant quelques missions à accomplir, quelques détails à régler pour ne rien regretter. On apprend au fil du roman à l'aimer, cet Albert un peu "taiseux", et on fond pour le petit Gilles qui se cherche en héros balsacien, et trouvera finalement la place qui lui revient, précieux héritage d'un père à jamais vénéré.
N° 3
Intuitions
de Dominique Dyens
Autre ambiance, autre époque : de nos jours, dans une coquette banlieue parisienne, vit un joli couple très Fig'Mag', les Royer, et ses deux enfants. Mais l'annonce du mariage de l'aîné va faire exploser sans merci ce beau tableau si lisse. La future belle-fille ne semble pas du tout convenir aux attentes de Nathalie Royer, et sa paranoïa va la mener à exhumer d'anciennes blessures cachées, de lourds secrets intimes. Un suspense qui ne vous lâche pas, une écriture rapide et efficace, et une fin totalement déroutante !
N°4
Miss Sweety
de Valérie Saubade
Londres. Septembre 2001. Samantha Fallow, 36 ans, vit avec sa grand-mère et la soeur de celle-ci dans une demeure du chic quartier de Hampstead. Miss Sweety, c'est le pseudo qu'elle s'est choisie lorsqu'elle tient le courrier du coeur du magazine You and I. Un jour, elle reçoit des lettres de menace, et en alerte la police qui ne la prend pas au sérieux. Samantha décide, avec la complicité de ses colocataires, de mener l'enquête. Comme toujours dans les romans de Valérie Saubade, les héros sont savoureux, et particulièrement ces deux vieilles dames indignes qui passent leur temps à se chamailler pour de vieilles histoires de coeur. Peut-être pas son meilleur roman - si ce n'est déjà fait je vous invite instamment à dévorer "Happy birthday grand-mère" et "les petites soeurs"- mais vous y prendrez beaucoup de plaisir, et un peu d'humour après les deux premiers ouvrages cités, cela ne fait pas de mal...
Et je termine cette rubrique façon Apostrophes avec mon préféré :
N°5
Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur
de Harper Lee
Nous voici dans les années 30, en Alabama. Atticus Finch y est avocat et vit seul avec ses deux enfants, Jem et Scout, la narratrice, petit "garçon manqué" à la candeur et à la fraîcheur irrésistibles. En filigrane de leurs farces et de leur découverte du monde des adultes, on perçoit le climat lourd et tendu qui règnait dans ces petites villes du Sud profond, où le racisme était encore si présent. A partir du jour où Atticus est commis d'office pour défendre un Noir accusé d'avoir violé une Blanche, tout bascule dans la vie de Scout, et cette seconde partie du roman consacrée au procès et ses conséquences vous tiendra en haleine jusqu'au bout. Ce livre, paru en 1961, est l'unique ouvrage de Harper Lee, pour lequel elle obtint le Prix Pulitzer.
Un seul mot pour le qualifier : Chef d'oeuvre absolu.