Breizh forever/de la petite mer à la fin des terres
Pour certains d'entre nous, les envies de lointaines évasions ayant été
mises à mal, il a fallu piocher dans nos ressources hexagonales,
que personnellement je qualifierais d'infinies. Ne serait-ce que sur
ce petit bout de territoire bien à l'ouest, dont je n'aurai jamais,
c'est certain, exploré tous les secrets.
{l'île aux Moines, vue de l'embarcadère}
Les îles ont ceci de fabuleux qu'elles offrent la grisante sensation de devenir
des aventuriers en puissance. Encore faut-il qu'elles soient désertes...
{île aux Moines : petits détails bretons}
Beaucoup de Robinson et quelques Vendredi ce jour-là sur l'Île aux Moines.
Ruser pour prendre la tengeante fut une épuisante épreuve. J'avais quitté
Paris et ses ravagés de la Petite Reine, pour retrouver ici l'intégralité
de la bobosphère vélocypédique, flanquée de croquignolettes carioles
destinées à promener leurs petits. Attention, tout ceci est très louable
(si cela avait existé lorsque j'étais jeune maman, j'aurais adhéré
sans hésitation!)
{pas de Bretagne sans calvaire ! lorsque vient le soir, tous les Poulidor sont à l'apéro,
l'île est à nous, ou presque}
Mais trop, c'est trop. On ne savait plus ou mettre nos pauvres pieds.
En clair, le piéton est devenu une espèce rare qui réclame
protection au même titre que l'ours polaire ou la bernache nonnette.
{jolie plaque de porte et rose trémière intrépide}
Encore éblouie par le souvenir de Bréhat, j'ai été (un tout petit peu) déçue.
Les moments magiques se sont fait prier, et ne sont arrivés qu'en toute fin
de journée, alors que nous devions embarquer pour le retour sur Vannes.
{à Vannes, surprenants jardins éphémères et petits poètes du dimanche; les plaques scellées
dans le pavage nous précisent que nous sommes en Bretagne, près de la mer, et que celle-ci
n'est pas une poubelle; boutique d'épices où j'ai fait provision de fenugrec,
de colombo et de massala}
Le Morbihan, littéralement : Petite Mer, est le seul département breton
à porter un nom du cru, bien que dans les faits, on y parle aujourd'hui
assez peu la langue de Nominoë. Mais à Vannes, la plupart des rues
du quartier médiéval en rappellent l'empreinte.
{Vannes : le gousset plein d'écus sonnants est l'enseigne d'une banque moderne;
et celle de la crêperie Dan Ewen est soucieuse du bien-être de ses clients...}
La vieille ville a conservé la gracieuse authenticité de ses belles maisons
à colombages. D'amusantes enseignes, copies modernes de celles d'antan, se
balancent au-dessus de commerces aux devantures soignées, tandis que
des jardins éphémères ponctuent nos promenades au fil des rues.
{Notre-Dame-de-Trébellec}
Quittons notre Petite Mer pour nous avancer vers le Finistère (Penn-Ar-Bed
en breton). Tout au long de ce périple, le challenge sera de repérer
un coin pique-nique pour notre pause de la mi-journée. Et à chaque fois,
s'imposera l'ombre apaisante d'une chapelle (la région n'en manque pas !)
comme celle de Notre-Dame de Trébellec.
{Pont-Aven : contraste entre la modestie de la pierre et la plaque...royale !}
{au musée de Pont Aven, quelques intéressants petits maîtres bretons ou issus de l'Ecole,
mais les essentiels de Paul Gauguin et Emile Bernard n'y sont pas.}
Direction Quimper, via Pont-Aven, sous une chaleur intense, qui nous donne
davantage envie de plonger dans un bassin de Perrier-citron plutôt que
déguster ses incomparables galettes.
Le musée consacré aux peintres de l'Ecole de Pont-Aven, est installé
dans l'annexe de l'ancien hôtel Julia, dont la clientèle, composée
d'artistes étrangers, et c'était courant à l'époque,
payait son dû en oeuvres peintes sur des panneaux de bois.
{Carl Moser : "coiffe at Konk Kern"}
J'y ai retrouvé avec bonheur quelques oeuvres de Carl Moser, dont
cette jeune fille, et vous invite, si vous ne connaissez pas encore
ce peintre subtil et léger, à en savoir plus sur lui ICI
{à Pont-Aven, se succèdent jolies boutiques et restaurants renommés}
Un peu plus haut sur la carte, nous voici à Quimper, chef-lieu du département.
L'incontournable cathédrale Saint Corentin nous accueille avec une envolée
de cloches dominicales. La ville somnole un peu en ce dimanche, on voit
des files de Quimpérois masqués à l'entrée des pâtisseries d'où ils ressortent,
un précieux colis enrubanné dans les mains (Far ? Kouign Amann ?)
{musée départemental breton de Quimper, un régal, ambiance feutrée, richesse des productions,
oeuvres superbes de l'expo temporaire, ici autoportrait de Madeleine Fié-Fieux, émotion devant
le magnifique visage, si contemporain mais si grave, de cette petite fille "modèle",
et enfin, coeur breton stylisé, logo du musée}
Ce sont les collections du Musée Départemental breton qui nous nourriront
de leurs chefs d'oeuvres. Pas un chat entre midi et deux, on pouvait aller
et venir d'une salle à l'autre en toute liberté, revenir sur nos pas...
Le luxe ! D'une richesse et d'une diversité extraordinaires,
ce musée, installé dans l'ancien palais des évêques de Cornouaille,
nous fait vivre toute l'histoire de la province, de la préhistoire
jusqu'à la période contemporaine, et c'est un régal.
Une exposition temporaire nous permettra également de découvrir
deux artistes plutôt méconnus, et on se demande pourquoi, Emile Simon
et son élève Madeleine Fié-Fieux (zozotants s'abstenir)
{Emile Simon : le goûter}
{tout nous rappelle ici que nous sommes bel et bien en Bretagne, sauf la dernière photo :
j'ai craqué sur cette vitrine alléchante, mais c'était un dimanche heureusement ! ;-)
Bon, je vous sens las... Ce billet pur beurre de baratte a provoqué
comme un léger assoupissement. Allez, courage, on termine avec
l'incontournable Locronan.
{Locronan à la tombée de la nuit... On adore avoir peur...}
S'il y un lieu où la magie des légendes bretonnes semble prendre toute son
identité, c'est bien à Locronan. Soeur jumelle finistérienne de Rochefort en Terre,
son aspect semble néanmoins plus austère, et c'est là tout le secret de sa beauté.
Plusieurs metteurs en scène ont été inspirés par ses pierres noires zébrées
de lichens, et parmi les films les plus connus, citons Tess, Chouans !,
Un long dimanche de fiançailles...
Locronan fut connue pour la production et l'exploitation du chanvre, filé et tissé
afin de confectionner des voiles pour la marine royale, activité stoppée au moment
de la première guerre mondiale. Ses célèbres Troménies, sortes de Pardons
s'étirant en longues processions sur un territoire précis, sont encore en vigueur
et attirent de plus en plus de monde.
{une enseigne très explicite; la chaire dans l'église Saint Ronan, qui donna son nom à la ville}
Quelques adresses si l'envie vous prenait de partir pour un Tro Breizh* buissonnier.
A Vannes :
- Le musée des Beaux-Arts, la Cohue
- Les Cop's (plein de jolies choses des marques qu'aime bien, mais aussi
de créatrices inspirées comme Anne-Lise Pucci
- La cale aux épices (le monde entier dans des petites fioles magiques)
- La Villa Romana (bon d'accord, c'est une pizzeria, mais avec de la chance
vous aurez comme nous une vue sublime sur les remparts, et les pâtes
et le service sont délicieux)
A Pont-Aven :
- Biscuiterie Loc Maria (un must)
- Maison B (j'aimerais tellement qu'elle existe aussi à Paris !!! )
A Quimper :
- Le musée départemental breton
- Les macarons de Philomène (sans commentaire...)
- Les cariatides, sans site, très bon restaurant situé dans une jolie rue piétonne
- Hôtel Gradlon (un charme fou, un peu british)
J'ai oublié de vous dire qu'il y aura un troisième volet !
Rendez-vous dans quelques jours ;-)
*Le Tro Breizh, qui en breton signifie « tour de Bretagne », est un pèlerinage catholique
qui relie les villes des sept saints fondateurs de la Bretagne. Ces sept saints sont,
selon une construction tardive, à la fois littéraire et hagiographique, des moines venus
du Pays de Galles et de la Cornouailles britannique vers les Vᵉ siècle et VIᵉ siècle,
apportant le christianisme en Armorique et y fondant les premiers évêchés
[source Wikipedia]