De l'autre côté du miroir
A force de rêver derrière un écran, on finit par éprouver le sentiment
de vivre par procuration. Aussi lorsque l'occasion se présente de voir,
toucher, sentir, tout ce qui ne semblait que mythe et mirage, on la saisit.
Attention, conte de fées...
Marie-Noëlle, première fée sur mon chemin, m'a accueillie en VIP
dans sa délicieuse chaumière, blottie dans un village de la
campagne normande. Le petit côté "Barnaby" de l'endroit ne pouvait
qu'avoir séduit cette grande adoratrice de l'Angleterre.
A peine avais-je mis un pas chez elle que je m'émerveillais de toute chose.
"Attends, me dit-elle, "tu n'as rien vu ! Là où nous irons demain,
tu ne seras pas au bout de ton enchantement..."
{toute l'Angleterre dans ce coin de Normandie...
Mais la gastronomie reste française, fort heureusement !}
Après un petit souper de novembre raffiné et plein d'attentions pour la
non-consommatrice de viande que je suis - velouté de la dernière butternut
du jardin, lasagnes végétariennes, crumble de pommes- suivi d'une nuit calme,
nous nous sommes acheminées vers le lieu du délit (du délice ?)
{même sans soleil, avec des fleurs en fin de vie, cette maison irradie de charme et de douceur}
{Quel crime a été commis derrière les grilles de cette mystérieuse bâtisse ? Barnaby enquête...}
Direction Saint Martin aux Chartrains, près de Pont-Lévêque, car c'est là
qu'intervient la seconde fée. Vous est-il arrivé une fois dans
votre vie d'avoir été accueillie par une famille de pommes ?
Ici tout semble possible.
Chantal tient une maison d'hôtes depuis deux ans. Que dire d'elle si
ce n'est qu'elle possède un goût exquis et un sens du détail extraordinaire.
Chaque objet, chaque élément de décor, est pensé, agencé avec minutie.
Le miracle est que tout semble parfaitement naturel !
Par hasard ou pas est le nom de cette maison,
et on ne pouvait pas mieux trouver.
Ce week-end-là, pas d'hôtes dans les chambres, mais un événement
particulièrement notable : une vente-exposition des créations
de Rêves d'argile.
Voici donc notre troisième fée en action.
Mo (Madame Rêves d'argile) est une personne incroyable. De ses mains
sont nées toutes les merveilles ornant les tables installées
dans la dépendance. Un franc sourire aux lèvres, elle va de l'une à l'autre,
avec un petit mot gentil, une bise de bienvenue, des cris de joie
lorsqu'elle retrouve une connaissance, émaillés ce petit accent
plein de soleil qu'on n'entend plus guère à Paris puisque même
les Provençaux exilés ont adopté le parler pointu de la capitale.
On rêve de tablées dressées sur de simples planches brutes où l'on
aura jeté un drap de lin un peu usé, et qui mettent remarquablement
en valeur la vaisselle immaculée ombrée de noir.
L'après-midi s'étire comme un chat au soleil. De chat, point,
mais une des poules venues me saluer le temps d'un break.
Une pomme (sont-elles joueuses ici ! )fait de la balançoire.
On décide une petite balade en bord de mer.
Trouville-Deauville, un grand classique. Ma préférence va à Honfleur
mais nous n'aurons pas le temps. Le bol d'air traditionnel sur la plage pris,
une courte errance dans les rues quasi désertes de Trouville nous mène
chez Gipsy,où nous retrouvons d'autres instagrammeuses insatiables
puis chez La Maison à Deauville.
Quelques Chabadabada fredonnés flottent encore dans l'air iodé,
et je réalise à quel point je suis littéralement
transportée par les plages lelouchiennes comme celle-ci.
{la plage de Trouville à marée basse}
{La Maison à Deauville : bel écrin pour de jolies choses}
La ville et ses tracas de circulation nous ennuie très vite :
retour entre chien et loup chez Chantal pour la suite de la journée.
Lorsque le soir descend, doucement les lumières s'allument.
Les derniers visiteurs regagnent frileusement leurs véhicules
les bras chargés, pendant que déjà fées et lutins s'agitent en cuisine.
Fou-rires, échanges de photos, anecdotes, témoignages, la soirée fut
gaie et animée. Nous étions toutes et tous (oui, beaucoup de messieurs !)
réunis autour d'une même philosophie : s'accorder une parenthèse
de gentillesse et de poésie pour un week-end.
{la source miraculeuse Ste Clothilde, sensée guérir tous les maux...}
Le lendemain, il restait encore beaucoup à voir dans le village de Marie-Noëlle.
La pluie s'étant elle aussi invitée sans carton, nous avons arpenté
quelques chemins boueux, mais la beauté absolue des paysages en cette
fin d'automne compensait largement l'inconvénient de voir mon
brushing se transformer en ressorts furieux.
A Saint Germain de Pasquier, près de la vallée de l'Oison, on trouve
la plus petite mairie de France qui, fiérote, arbore son drapeau
aux trois couleurs avec la même hardiesse que l'Hôtel de Ville de Paris !
(non mais...)
Nous concluerons cette escapade normande par un petit tour dans Rouen,
qui en mérite plus d'un, et que j'ai bien l'intention de revoir avec
toute l'attention que cette superbe ville mérite.
Il faut dire que j'avais une guide parfaite !
{le Gros Horloge, une merveille; on ne va pas à Rouen sans déjeuner chez Dame Cakes!}
Le soir, dans le train qui me ramenait vers Paris, j'avais encore
en tête toutes ces belles et pleines heures passées en douce compagnie,
tous ces paysages encore si bien préservés, tous ces moments bien courts,
si fugaces qu'on se demande si on ne les a pas rêvés.
Dans un sac en papier kraft où quelqu'un avait écrit
" Dominique/la chambre à bois" * quelques jolies prises en céramique
m'assuraient que non, je n'avais pas rêvé.
* du nom de mon Instagram