Derniers jours avant inventaire
Nous approchons. Il y a ce je-ne-sais-quoi dans l'air qui annonce des
jours de fête et d'abandon. Dans les beaux quartiers parisiens, les
noms magiques s'envolent en ailes de papillon, en ballons d'or, les
gourmettes quittent les fins poignets pour enlacer les façades de la
rue Cambon, toute à la gloire de Mademoiselle, quand, plus humblement
dans ma rue, les feuilles des pommiers trilobés parent d'une rivière
ambrée les mythiques grilles qui les enlacent.
{mon ouvrage de cet hiver, pas très audacieux... Dior, Chanel, le Ritz, la rue des Martyrs,
la rue d'Alesia : des styles très différents}
Une écharpe "au kilomètre" aura le bon (ou le mauvais ?) goût d'être en accord
avec cette chromie, en m'incitant à rester chez moi penchée sur l'ouvrage,
fuyant les week-ends bondés et hautement sonores. Et ce ne sont pas les
madeleines du Ritz, dévorées avec la déférence qui sied à leur rang,
qui me contrediront.
{promenade d'un pas alerte entre Saint-Germain vers le Marais, un matin de semaine : l'Institut suédois
dans tout son dépouillement; la boutique de Marin Montagut dans toute son exubérance; l'hôtel Caron de Beaumarchais
où l'on s'est souvent promis de réserver une nuit; et le Loir dans la théière, pour me rappeler la jeune femme que je fus}
N'étant pas à une contradiction près, chaque fin d'année, je succombe
à mon petit rituel "Marchés de Noël". Je ne sais pas trop comment
appeler cela autrement, car en réalité, je n'aime pas beaucoup ces
barraques à frites, à vin chaud ou à décorations nordiques made in China.
Non, ce que je savoure, c'est l'ambiance qui règne dans les villes du nord
ou celles de l'est, les chants qui envahissent les ruelles frileuses,
les lumières, les scintillements, les devantures gorgées de chocolats,
même si ça non plus, je n'en raffole pas, mais ceux à qui j'en offre, si !
Ce devait être Copenhague. La papillote mauvaise surprise (voir mon billet
précédent) s'étant incrustée ainsi qu'une méchante fée, ce sera Bruxelles,
parce que c'est à 1h30 en Eurostar et que deux nuits suffisent.
Bruxelles ma belle comme chantait Dick Annegarn n'a certes pas la séduction
absolue de Bruges ou de Gand, mais voir au moins une fois dans sa vie la
Grand Place illuminée est un must. Je crois que je ne me départirai jamais de
cette naïveté un peu candide qui me fait encore écarquiller les yeux devant
le tralala chatoyant qui accompagne les fêtes de fin d'année.
Pendant ce temps, les mères Noël aux mains agiles ne chôment pas. Leur renne
s'est arrêté à plusieurs reprises devant ma boîte aux lettres, déversant
de leur hotte jolis mots et doux cadeaux. Emballer les présents à mon tour
aura été un réel plaisir. Froisser les papiers de soie, déplier les rouleaux,
choisir les étiquettes et les liens, une mission une fois de plus très
enfantine que je ne suis pas seule à revendiquer.
{jolis cadeaux des quatre coins de France; jacinthe très à l'aise dans ce petit vase découvert
dans le grenier maternel, au délicat rose saumoné}
La famille n'est pas grande, mais les occasions de se réunir si rares
qu'on ne peut réfréner la frénésie qui s'empare de vous, pauvre créature
sans volonté, devant les vitrines regorgeant de fourbes tentations,
lesquelles seront, on le souhaite, accueillies avec sourires ou cris de joie.
{on s'amuse, on bricole... tous ces rubans et frisouillis, que de tentations pour un chat !}
Je ne pense pas me tromper en vous disant à l'an prochain...
En attendant, même si les mots sont vains, même si malgré leur sincérité,
nos vœux de paix et d'amour semblent tomber dans un puits sans fond,
il faut continuer à croire en des temps meilleurs. Je vous souhaite donc
une belle année 2024, épanouie et apaisée.
Mais un peu folle quand même.