L'été des musées 1 : Lalanne à Versailles
Versailles sera toujours Versailles. En toutes saisons.
Pourtant, la vague de chaleur ce jour-là ne favorisait pas les sorties
(juste envie de rester calfeutrée chez soi stores tirés, immergée dans
une baignoire remplie de glaçons) mais les places étant réservées depuis
déjà longtemps, nous avons pris la direction du Trianon et du Hameau.
L'entrée ne se fait pas sur la Place d'Armes, mais au bout d'une allée calme
et ombragée, ce qui permet, après avoir versé notre obole au Cerbère local,
d'aller se stationner à l'intérieur du parc. Oui, oui, c'est mal, Versailles
est très bien desservi par le train, mais par 31°, accompagnés d'une petite
fille de 8 ans, lestés d'un sac pique-nique, la Clio climatisée, c'est bien.
{jolis détails d'une des pièces du Trianon ;
champ de moutons : une des œuvres les plus célèbres, sujets de multiples copies
et interprétations, de François-Xavier et Claude Lalanne}
Le prétexte de cette visite, outre le fait d'expliquer à ladite petite fille
qui était Louis XIV, que Lenôtre n'est pas qu'un traiteur et Le Vau
pas le petit de la vache, reposait essentiellement sur l'exposition des œuvres
animalières du couple Lalanne.
{le lapin de victoire, de Claude Lalanne, mon préféré pour son petit air
Alice au pays des Merveilles}
François-Xavier et Claude Lalanne formaient un couple de sculpteurs tout à fait
déroutant. Née sans doute d'une commande faite par Yves Saint Laurent et
Pierre Bergé, dans les années 60, leur inspiration fut majoritairement basée
sur une représentation idéale et romanesque de la nature. Leur style
très épuré m'a souvent fait penser à celui de François Pompon, le "père"
du célèbre ours polaire et du lapin courant.
D'abord accueillis par une pomme, seule exception végétale avec le "choupatte"
que nous découvrirons un peu plus loin, nos pas nous mènent du prestigieux Trianon
au toujours poétique Hameau, restauré fidèlement à son modèle d'origine.
{la ménagerie Lalanne ! un ours monumental, un wapiti, une vache-paysage, un couple
de tourterelles, un canard flottant de fête foraine, un âne attelé et les célèbres moutons
ont investi le Petit Trianon et le Hameau : auraient-ils eu l'aval de Marie-Antoinette ?}
{le midi, nous avons déjeuné frugalement sous un chêne, belle occasion de prodiguer une
leçon de choses sur le terrain... Ainsi, nous avons croisé noisetiers, érables, saules,
oliviers, tilleuls, examiné leurs feuilles et leurs fruits, et c'était tellement plus
passionnant que dans les pages d'un livre...}
On découvre au fil d'une extraordinaire promenade quasi solitaire, tandis que
tout le monde s'entasse et se selfie dans la Galerie des Glaces, un monde
poétique et pacifique, une vache paysage, un ours gigantesque, des canards
à col doré, un singe avisé, quelques sangliers, un couple de colombes...
Ce hameau, voulu et tant aimé par une reine qui était si peu faite pour l'être,
pillé, puis abandonné, fut l'objet de trois restaurations. D'inspiration
à la fois normande et flamande, il regroupe plusieurs corps de bâtiments
- laiterie, boudoir, moulin, maisons des valets, réchauffoir, billard, etc.
Moi j'y ai surtout vu un air anglais tout à fait délicieux, et naturellement,
mes envies chroniques de maison de campagne sont revenues à tire d'ailes.
Sur la photo ci-dessus, ne se croirait-on pas dans le jardin aux sillons
bien ordonnés de Monsieur Mc Gregor ?
(dit celle qui est allée au cinéma voir Pierre Lapin 2...)
En toute fin d'après-midi, l'air s'est chargé d'orage, nous nous sommes un peu
perdus dans le parc, puis retrouvés grâce à Suzanne, 8 ans, qui a un sérieux
sens de l'orientation.
{le "choupatte", œuvre de Claude, se dresse fièrement sur ses ergots,
tandis que l'oie, dubitative, fixe un point inconnu sur l'horizon...}
Je ne saurais trop vous conseiller, si vous passez par là, cette superbe
exposition que, pur bonheur, l'on peut admirer sans masque. Elle est
parfaite pour amuser intelligemment les enfants, mais accompagnés ou non,
vous-même y retrouverez les délices et l'enthousiasme de votre propre enfance.
Les Lalanne à Trianon, jusqu'au 10 octobre