Couleurs du temps
L'été parti en claquant la porte, aussi tardivement que violemment,
reconnaissons-le, les temps orange sont revenus. Chaque année, la soupe
aux courges, les coloquintes et cette drôle de fête qui n'intéresse que
les moins de 12 ans badigeonnent notre quotidien.
{un peu d'automne sans orange : lecture coup de foudre, chatte coup de cœur,
tarte aux pommes et pommes de pin, courrier faisant suite à l'expo du MAM}
Couleur tonique pour les uns, réminiscence consternée des seventies
pour les autres, le orange assure une présence si insistante que nous
pourrions en être à deux doigts de l'écœurement. C'est la raison pour
laquelle vous en verrez très peu dans ce billet. Contentons-nous de
célébrer l'automne, saison si photogénique et si généreuse en
exaltations poétiques.
{"je sais que ma vie sera un continuel voyage sur une mer incertaine, c'est une raison
pour que je construise mon bateau solidement"}
Ce jour-là, une file interminable se presse devant l'entrée du Musée d'Art Moderne*.
Il fait soleil, heureusement, les gens discutent entre eux, liés par l'espoir
impatient d'admirer cette superbe rétrospective des œuvres de Nicolas de Staël.
Inclassable, insaisissable, il livre une œuvre vive et personnelle, à fleur
de peau, comme exécutée dans une urgence dont lui seul éprouve la nécessité.
Si Nicolas de Staël est un artiste assez éloigné de mes critères habituels,
j'ai indiscutablement été séduite par sa maîtrise des couleurs et son talent
à poétiser l'ordinaire.
{les jardins du Musée Bourdelle; le Marais, toujours inspirant}
Un peu de Paris était le titre d'un des (nombreux) albums de Jean-Jacques Sempé
en bonne place dans une de mes bibliothèques. Ce billet, qui aurait dû vous parler
d'ailleurs, de découvertes et de petits voyages, se contentera d'émietter quelques
"parisianneries" un peu décousues. La vie est déroutante, elle
vous réserve parfois de drôles de surprises, dont on se serait bien passées.
{les quais, éternels, un box de bouquiniste, un bateau, la Seine, je ne me lasserai jamais
de ce décor si enchanteur dans sa banalité}
{L'hôtel de Soubise abritait il n'y a pas si longtemps les Archives Nationales;
devant, un délicieux jardin orné de topiaires en cuberdons et doté d'un péristyle, invitant à la lecture ou la contemplation }
Un peu de Paris, donc. Pas de ligne directrice, on attrape un bus, un peu au hasard.
Comme on aurait aimé mieux connaître le temps de ceux dont la plateforme ouverte
pouvait accueillir les retardataires essoufflés ! Dans le Marais, on lâche les rues
commerçantes pour les secrets bien gardés derrière les porches de hôtels particuliers.
On se souvient qu'à l'Hôtel de Soubise, on organisait des concerts de jeunes talents
mécénés par l'entreprise pour laquelle on travaillait.
{arrière-cour donnant sur la rue des Francs-Bourgeois}
{chez Mamie Gâteaux, rue du Cherche-Midi : décor de grand-mère, salades, quiches, gros gâteaux à la découpe,
souvent copiée, jamais égalée depuis vingt ans !}
Profiter du passage d'une cousine pour déjeuner chez Mamie Gâteaux*
La salle est comble, mais le service efficace et les desserts à tomber.
On dénombre deux hommes dans cette assemblée de femmes.
La nourriture serait-elle genrée ?
{les ultimes dahlias au beige rosé délicat clament leur statut de fleurs libres et engagées;
premier et sans doute dernier tome de mon blog, dommage...}
Chez soi, alors que la lumière baisse, on organise un nid ouaté, en tentant
de se débarrasser de tous ces petits objets qui, paradoxalement, encombrent
autant qu'ils réconfortent. Pour conserver ce qui sans doute disparaitra
dans les limbes, on a fait renaitre la Ligne 13 sous forme d'un livre, oui,
un vrai, avec du vrai papier ! Mais la déception est grande, les photos
qu'on aimait à l'écran ont été massacrées à l'impression, tout est sombre
et la mise en page plus qu'approximative.
{girolles françaises, pâte à tarte maison avec herbes et graines dedans, tarte achevée; livre de recettes si inspirantes
qu'on finit par être convaicue de faire un potage au potimarron !}
Ne faisant pas vraiment partie du Club des amateurs de potiron (et autres
courges butternut, potimarrons, etc) je me venge sur les champignons, une passion
remontant à l'époque où je pouvais les cueillir dans l'humus des grées du
Morbihan. Ces girolles proviennent du primeur du coin de la rue, mais leur
parfum sylvestre me fait l'effet d'une petite madeleine. Se régaler des
premières juste sautées à la poêle, puis faire une tarte avec ce qui reste,
lancer une petite invitation comme ça, et saluer novembre.